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Nitobe Inazō

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Nitobe Inazō (新渡戸 稲造?, ) est un éducateur, docteur en agronomie et en droit, écrivain et diplomate. Il a réalisé de nombreux écrits, dont le plus célèbre est Bushidō, l'âme du Japon (1899).

Nitobe Inazō naît en 1862 à Morioka, dans l’ancien fief de Nanbu, situé dans la province de Mutsu (également appelée Ōshū), correspondant aujourd’hui à la préfecture d’Iwate dans la région du Tōhoku. Il est le troisième fils d’une famille de samouraïs de rang moyen, au service du clan Nanbu, au sein d’une société encore marquée par les structures féodales de l’époque Edo. Sa famille serait descendante de l’un des deux grands clans guerriers de l’histoire japonaise, soit les Minamoto, soit les Taira, selon les sources.

Son nom de naissance est Inanosuke. Il est le fils de Nitobe Jūjirō (en), petit-fils de Nitobe Tsutō (en), et arrière-petit-fils de Nitobe Denzō, également connu sous le nom de Koretami. Koretami est un lettré confucéen réputé et administrateur respecté du domaine de Morioka[1]. La famille Nitobe exerçait, par conséquent, une certaine influence intellectuelle et morale dans la région. Ainsi, celle-ci prêtait une grande attention à l’éducation et à la transmission des valeurs traditionnelles en grande partie liées aux rites des samouraïs et autres classes dirigeantes.

Ses parents meurent alors qu’il est encore jeune, le laissant orphelin. Il est recueilli et élevé par son oncle, Ōta Tokitoshi (en)[2], qui l’adopte formellement. Cette adoption entraîne un changement de nom, Inazō sera donc connu comme « Ōta Inazō » pendant cette période. Plus tard, à la mort de son frère aîné, Inazō reprend le nom de Nitobe afin de perpétuer la lignée principale de la famille

Éducation

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Son oncle joue un rôle décisif dans son éducation et son orientation intellectuelle, l’encourageant très tôt à s’ouvrir aux langues et aux savoirs venus d’Occident. C’est à l’âge de dix ans qu’il commence l’apprentissage de l’anglais, une langue encore peu répandue au Japon à cette époque, mais perçue comme essentielle pour l’avenir du pays dans l’ère Meiji naissante.

Sur les recommandations de son oncle, Nitobe intègre la Tokyo English School, un établissement fondé pour offrir une éducation moderne et ouverte à l’international. Il y approfondit ses connaissances linguistiques et découvre la pensée occidentale. Cette formation le prépare à entrer, peu après, au Collège d'agriculture de Sapporo (aujourd’hui l’université d'Hokkaidō), l’un des établissements pionniers dans l’enseignement scientifique et agricole au Japon, fondé avec l’appui d’experts américains.

C’est là qu’il rencontre plusieurs figures intellectuelles majeures, parmi lesquelles Kanzo Uchimura, qui deviendra un penseur chrétien très influent, Shōsuke Satō, futur président de l’université.

Appartenance religieuse

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La rencontre de Nitobe Inazō avec le christianisme remonte à ses années d’études à l’Université de Sapporo, où il rejoint un groupe chrétien parmi les étudiants parmi lesquels il va devenir rapidement très actif. C’est dans ce contexte qu’il est baptisé par un des missionnaires méthodistes de l’archipel[3] : Merriman Colbert Harris (en). Ceci marque le début d’un engagement religieux qui va dès lors influencer profondément sa pensée et son parcours. Son intérêt pour le christianisme ne se limite pas à une simple adhésion doctrinale, mais s’inscrit dans une quête plus large de valeurs morales et spirituelles susceptibles de guider sa vie et de contribuer à la modernisation du Japon.

Conversion au quakerisme

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En 1884, Nitobe se rend aux États-Unis pour poursuivre ses études à Meadville en Pennsylvanie. Il y voit une opportunité non seulement académique, mais aussi spirituelle, espérant que son engagement religieux facilitera son intégration dans la société américaine[4]. Il assiste régulièrement à des réunions religieuses et laisse une impression favorable sur ses interlocuteurs. C’est durant cette période, en 1886, qu’il entre en contact avec la Société religieuse des Amis, plus connue sous le nom de quakers. Bien que les circonstances exactes de cette découverte soient parfois relayées sous une forme romancée[5] (probablement pour impressionner ses lecteurs ou interlocuteurs), il semble qu’il ait été sincèrement attiré par les idéaux de cette communauté.

Nitobe est particulièrement séduit par la simplicité, l’intensité spirituelle et l’authenticité des quakers. Il déclare apprécier leur culte « non sacramentel »[6], qu’il considère comme « l’approche la plus proche d’une église idéale et, de fait, la forme la plus rationnelle, ou plutôt, la plus spirituelle du service divin »[6]. À ses yeux, les quakers incarnent une approche du christianisme dépouillée de ritualisme, fondée sur l’introspection, la paix intérieure et l’action morale. Il affirme que le quakerisme représente « l’approche la plus proche de l’église idéale »[6].

Dôme de l'université Johns-Hopkins, où Nitobe à étudié

Son passage dans une université où les quakers exercent une forte influence intellectuelle et morale n’est sans doute pas étranger à cette conversion. Nitobe critique d’ailleurs ouvertement le manque de ferveur religieuse visible dans les milieux universitaires de l'université Johns-Hopkins.

De plus, lors de la décision d’envoyer des missionnaires quakers au Japon, Nitobe fournit des informations précieuses aux missionnaires quakers envoyés dans l’archipel, jouant un rôle important dans l’implantation de cette confession encore peu connue au Japon. Il recommande au missionnaires une stratégie différente des tentatives principales d'évangélisation, plus adaptée au contexte culturel et social japonais : plutôt que de chercher à convertir d’abord les masses populaires (largement influencées par le bouddhisme), il recommande de s’adresser en priorité aux élites, espérant ainsi favoriser l’émergence d’un christianisme « véritablement japonais » enraciné dans les sphères dirigeantes.

Enfin, l’une des convictions les plus durables de Nitobe est son adhésion à la doctrine pacifiste des quakers. À une époque où le Japon s’ouvre aux idéologies impérialistes et militaristes, il affirme avec force son engagement en faveur de la paix, convaincu que le rejet de la guerre constitue l’un des plus hauts accomplissements moraux de la religion chrétienne. Cette position le distingue durablement dans le paysage intellectuel japonais de la fin du XIXe et du début du XXe siècle[7].

Carrière universitaire

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Nitobe Inazō va ensuite poursuivre des études supérieures entre son pays natal, les États-Unis et l’Allemagne. Devenu professeur, il joue un rôle clé dans la modernisation de l’enseignement au Japon et le développement des échanges académiques internationaux. Dès son plus jeune âge, Nitobe est exposé à l’anglais, une langue qui façonnera son avenir. En 1871, à l’âge de 9 ans, il quitte sa famille pour Tokyo afin de poursuivre ses études. La capitale, en pleine modernisation sous l’ère Meiji, est marquée par l’arrivée de nombreux enseignants occidentaux. Nitobe se plonge dans l’apprentissage de l’anglais, ce qui lui ouvre les portes d’une éducation tournée vers l’international. Sous la restauration de Meiji en 1868, le gouvernement cherche à étendre sa politique de colonisation, notamment à Hokkaidō à partir de 1869. Des colons japonais, dont d’anciens seigneurs, viennent développer l’économie locale, en particulier dans le domaine agricole, car Sapporo est un territoire riche en ressources.

Collège d'agriculture de Sapporo

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Plusieurs écoles agricoles se développent pour former les futurs colons et accompagner cette politique de colonisation. Le gouvernement fait venir des savants et experts occidentaux pour qu’ils transmettent leur savoir-faire en agronomie et introduisent de nouvelles techniques agricoles. En 1876, William Smith Clark est invité à Sapporo pour diriger le Collège d'agriculture de Sapporo. Professeur d’agriculture et de sciences naturelles, et président du Massachusetts College agricole Clark participe activement à la fondation du collège de Sapporo et transmet tout son savoir pour son développement. Nitobe entre au Collège agricole de Sapporo en 1877, où il étudie l’agriculture, la botanique, ainsi que la littérature anglaise.

Le collège d'agriculture de Sapporo (photographie de 1912)

Bien que la loi interdisant le christianisme ait été levée en 1873, l’enseignement de la religion chrétienne reste restreint au Japon. Par conséquent, son professeur, William Smith Clark, transmet ses valeurs chrétiennes de manière indirecte à ses élèves, en leur inculquant des principes de travail, de discipline et de responsabilité. Ces valeurs, notamment l’importance de l’ambition morale et sociale, ont profondément marqué Nitobe qu’il signe le Serment de la foi en Jésus avant de se faire baptiser l’année suivante.

Après avoir été diplômé du collège agricole en 1883, Nitobe passe un entretien pour entrer à l’Université de Tokyo, où il prononce cette phrase[8],[9]:

« 太平洋の橋になりたい »

— Nitobe Inazō

« Je veux devenir un pont (entre les deux rives) du Pacifique. »

Par cette déclaration, Nitobe exprime son désir de favoriser une compréhension mutuelle des civilisations et de maintenir la paix entre les nations. Pour réaliser ce rêve, il décide de poursuivre ses études aux États-Unis et en Allemagne. Ces années universitaires lui permettent non seulement de renforcer ses connaissances académiques, mais aussi de promouvoir les échanges interculturels. En étudiant les différents systèmes économiques, sociaux et agricoles des puissances occidentales, Nitobe développe un esprit réformateur, qui sera essentiel pour ses futures contributions à la modernisation du Japon.

En plus de son rôle d’enseignant, Nitobe s’investit dans l’éducation populaire avec l’héritage reçu de sa femme ils fondent l’école du soir En’yū (遠友夜学校, enyūyagakō?)[8]. Cette institution, gérée par des étudiants du Collège d'agriculture de Sapporo, offre un enseignement gratuit. Elle permet ainsi aux enfants modestes qui travaillent la journée de venir suivre les cours du soir. Nitobe fait de son école un véritable lieu d’ouverture et de transmission de valeurs, il encourage les élèves à s’ouvrir au monde, en mettant en avant l’importance des échanges interculturels et de la compréhension mutuelle entre les peuples. De plus, en tant quaker, il transmet à ses élèves les principes fondamentaux en mettant l’accent sur des valeurs telles que la bienveillance, la justice et la paix. L’école En’yū devient un modèle d’éducation alternative, favorisant l’accessibilité au savoir et le développement personnel des élèves.

Influence sur l'éducation dans les colonies de l'Empire

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En tant que pédagogue, Nitobe est également un acteur de l’expansion coloniale japonaise. Depuis le traité de Shimonoseki en 1895, le Japon étend son influence sur plusieurs territoires comme la Corée, la Mandchourie et Taïwan. En 1901, grâce à ses compétences en agronomie, Nitobe est envoyé à Taïwan pour contribuer au développement de l’industrie sucrière. Dans le cadre de cette politique coloniale, le Japon impose une assimilation culturelle et nationaliste, la langue japonaise devient obligatoire dans les écoles taïwanaises. Nitobe y enseigne, mais ses méthodes pédagogiques entrent rapidement en conflit avec les attentes du gouvernement. Influencé par ses convictions quaker et son expérience académique occidentale, il privilégie le dialogue interculturel et le respect des peuples colonisés. Ces positions, jugées trop libérales et occidentalisées par les autorités japonaises, le conduisent à démissionner.

Engagement pour la cause féminine

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La portail d'entrée de l'université pour femme de Tokyo

De retour au Japon, Nitobe met en pratique les valeurs et savoirs acquis à l’étranger. Convaincu de l’importance d’une éducation égalitaire, il s’engage pleinement dans la cause des femmes, contribuant de manière décisive à l’essor de leur accès au savoir. Au début du XXᵉ siècle, sous l’ère Meiji, l’éducation des femmes n’était pas une priorité, l’accès à l’université leur était fermé et les enseignements se concentraient principalement sur les tâches domestiques et les valeurs morales. En 1900, lors de l’Exposition universelle de Paris, Nitobe rencontre Yasui Tetsu (en), une femme chrétienne diplômée des universités d’Angleterre. Tous deux, profondément marqués par leur expérience en Occident, ils partagent une vision commune d’une éducation moderne et égalitaire. Cette rencontre renforce leur détermination à offrir aux femmes japonaises un accès à l’enseignement supérieur. En 1917, Nitobe publie l’essai intitulé Recommandation aux femmes (婦人に勧めて, Fujin ni susumete?)[10], dans lequel il dénonce le retard de l’éducation féminine au Japon et plaide pour son amélioration. En tant que quaker, il souligne l’égalité entre hommes et femmes et insiste sur la nécessité d’une éducation commune. Il devient le premier président de l’Université des femmes de Tokyo (東京女子大学, Tōkyō Joshi Daigaku?) en 1918. Cinq ans plus tard, Yasui Tetsu lui succède en tant que première femme présidente[11]. Elle y transmet les principes d’une éducation chrétienne visant à développer à la fois l’intellect et le caractère moral des étudiantes. Par son engagement, Nitobe Inazō peut être considéré comme l’un des précurseurs de l’éducation féminine moderne au Japon.

Son engagement académique se prolonge naturellement dans sa carrière diplomatique. En 1920, il devient sous-secrétaire général de la Société des Nations. A travers le soutien de la Commission internationale de coopération intellectuelle, il défend l’idée d’une paix fondée sur l’éducation et la compréhension mutuelle de chaque nation. Avec son expérience d’enseignant et de ses convictions quaker, Nitobe promeut les échanges intellectuels internationaux et pose les bases d’une coopération mondiale par le savoir.

Carrière diplomatique

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Au lendemain de la Ière Guerre Mondiale, la diplomatie multilatérale et la coopération internationale sont pour le Japon des voies nouvelles dans lesquelles le pays (jusque-là acteur des relations diplomatiques bilatérales classiques) décide de s’engager, en participant à la Conférence de la Paix qui se tient à Versailles à partir de 1919 : le Japon y participe en tant que puissance alliée des Etats occidentaux vainqueurs du conflit.

Nitobe Inazō ne fait pas lui-même partie de la délégation des plénipotentiaires japonais chargés de représenter le Japon à la conférence et d’y négocier pour le Japon les termes de ce qui deviendra le Traité de Versailles. C'est à l’âge de 58 ans que Nitobe Inazō inaugure sa carrière de diplomate, en occupant de 1920 à 1926 le poste de Sous-Secrétaire général de la Société des Nations.

Présidence au sein de l'Institut des relations du Pacifique

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Nitobe Inazō occupe ensuite, à partir de 1929, le poste de Président du Conseil japonais de la Commission sur les questions du Pacifique[12] de l'Institut des relations du Pacifique (太平洋問題調査会 , Taiheiyō mondai chōsakai?, Institute of Pacific Relations): une organisation internationale non-gouvernementale, que la traduction littérale de l’appellation japonaise 調査会  (chōsakai?) désigne clairement comme un institut de recherche n’étant pas investi de missions diplomatiques stricto sensu. Nitobe Inazō « a ainsi contribué à la coopération internationale »[12] ce qui résume l’objet de sa carrière de diplomate.

Participation à la Société des Nations

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Drapeau de la Société des Nations

C’est au sein de la Société des Nations, en tant que première organisation internationale de l’Histoire du monde contemporain dont le Japon et 32 autres États font partie, que Nitobe Inazō fait son entrée sur la scène diplomatique internationale, moins en tant que diplomate stricto sensu qu’en tant que personnalité du monde universitaire et littéraire de renommée internationale.

Même s’il n’en porte pas le titre et s’il n’est pas, au sens strict, un ministre plénipotentiaire, le statut de Nitobe Inazō peut être défini comme celui d’un ambassadeur culturel du Japon. Sa mission est de travailler au développement des échanges interculturels que la SDN a reçu pour mission de promouvoir au service de la mission plus large de l’organisation, qui est celle du maintien de la paix internationale[9].

Au cours de ces premières années de la Société des Nations (dont les Etats-Unis décident dès l’origine de ne pas devenir Etat-membre, et dont le Japon lui-même se retirera définitivement en 1935) Nitobe Inazō travaillera, de 1920 à 1926, à développer la coopération internationale dans les domaines spécifiques de la culture et de l’éducation, qui sont ses deux principaux domaines d’expertise.

Directeur de la Commission internationale de coopération intellectuelle

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Pendant ces sept années passées à Genève, siège de l’organisation, « il devient le Directeur de la Section des bureaux internationaux, sous l’égide de laquelle fut fondée la Commission internationale de coopération intellectuelle, préfiguration de la future UNESCO »[12].

Même si la publication de l’oeuvre est antérieure de plus de 20 années aux débuts de sa carrière diplomatique au sein de la SDN, « Bushidō, l’âme du Japon» (1899) constitue sans conteste la première pièce de l’œuvre accomplie par Nitobe Inazō pour faire connaître et servir l’image de son pays auprès des dirigeants des grands Etats occidentaux, et faire reconnaître la légitimité de son pays à être l'une des grandes puissances mondiales.

Télégramme du philosophe Henri Bergson, président de la CICI, à Inazo Nitobe, directeur de la section des bureaux internationaux de la SDN (dans laquelle se trouve la CICI)[13].

Ses œuvres les plus notables en tant qu’écrivain de renommée internationale, ainsi que les hautes fonctions universitaires que Nitobe Inazō avait occupées jusque-là, en tant que « directeur général du Premier Lycée supérieur et professeur à la Faculté impériale de Tokyo, où il assuma principalement un cours sur la politique des colonies »[12] le destinent à être le porte-parole le plus qualifié pour exercer cette mission d’ambassadeur culturel de son pays au sein de la Commission de coopération intellectuelle de la S.D.N.[9]

Parvenu au sommet de sa carrière, Nitobe Inazō reste ainsi fidèle à sa devise de « devenir un pont entre les deux rives du Pacifique »[8],[9] qu’il avait exprimée devant le jury d’admission de l’Université de Tokyo.

Cette ambition de jeunesse allait le hisser au rang des plus grandes personnalités qui oeuvrèrent, comme son prédécesseur Fukuzawa Yukichi[14], fondateur de l'université de Keio[15], à l’édification des grandes institutions pédagogiques du Japon moderne, dans un esprit d’ouverture aux échanges avec le reste du monde, en particulier dans les domaines de la culture et des sciences de l’éducation. A cet égard, les similitudes sont nombreuses entre Fukuzawe Yukichi et Nitobe Inazō : maîtrise parfaite de la langue anglaise, ouverture aux courants d’idées issus de l’Europe du Siècle des Lumières, efforts d’inculturation par la mise en commun et l’explicitation des valeurs culturelles et patrimoniales inspirées des meilleurs auteurs occidentaux, en particulier britanniques et allemands.

Rapport sur l'espéranto comme langue internationale auxiliaire

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La foi de Nitobe Inazō dans les vertus de l’internationalisme le porta aussi à présenter, en 1922, en qualité de Secrétaire général adjoint de la SDN, le rapport qui préconisait l’adoption de l’esperanto comme langue internationale auxiliaire au sein de l’organisation internationale. Malgré le rejet de ce rapport par l’Assemblée de la SDN en septembre 1922, il y a là un indice de la volonté de Nitobe Inazō de promouvoir le développement d’une société démocratique internationale.

Bien qu’il revête une dimension utopique, cet engagement militant de Nitobe Inazō au service de la promotion de l’esperanto témoigne de sa volonté visionnaire de faire entrer toutes les nations dans la sphère de la démocratie internationale. Et dans cette mesure, cette initiative va dans le sens des efforts qui aboutiront, au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, à la création de Organisation des Nation Unies malgré le maintien de multiples langues de travails au sein de l'organisation

Idéologie

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Territoire faisant partie de la sphère de coprospérité de la Grande Asie orientale

Au-delà de cet échec ponctuel et en définitive provisoire, Nitobe Inazō se définit, dès les débuts de sa carrière universitaire, comme un fervent partisan de l’idéologie internationaliste, qui se déploie pour le Japon de l’ère Taishō dans le contexte d’un expansionnisme colonial à l’intérieur de sa sphère d’influence extrême-orientale, et dans le cadre d’une volonté clairement affirmée d’occuper, avec la Grande-Bretagne, les États-Unis, l’Italie et la France, une place parmi les grandes puissances mondiales.

Partisan d’un internationalisme à la fois pacifiste (préférer le dialogue multilatéral au jeu des alliances de blocs pour éviter le renouvellement de conflits internationaux) et pragmatique (garantir la prospérité de l’économie capitaliste et libérale par la construction et le respect du droit international), Nitobe Inazō apparaît, dans le contexte de la montée de l’ultranationalisme, comme à la fois comme un précurseur et un visionnaire.

L’activité diplomatique de Nitobe Inazō ne concerne pas les enjeux diplomatiques tels que la défense des conquêtes territoriales du Japon, ou les autres enjeux de puissance économique ou militaire sur la scène internationale des années de la « démocratie Taishō ».

Conscient que l’appartenance du Japon à la SDN n’est objectivement qu’un levier pour la défense des intérêts stratégiques du Japon en tant que puissance économique et militaire, Nitobe ne s’autorise pas de cette considération pour agir au-delà du rôle qu’il a voulu jouer lui-même au service d’un dialogue interculturel. C'est là sa contribution propre à la mission de faire admettre des exigences que le Japon revendique comme stratégiques et légitimes, telle que la clause d'égalité raciale, et que les grandes puissances occidentales sont peu empressées à reconnaître.

Cette conflictualité inhérente au jeu diplomatique qui se déroule à l’échelle mondiale entre les grandes puissances est sans doute, pour Nitobe, une raison supplémentaire d’œuvrer au développement des relations multilatérales au service de la paix, dans le vaste champ d’action de la culture et de l’éducation.

Institut des relation du Pacifique et Association pour la Société des Nations

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Dans le même esprit, Nitobe Inazō travaillera au développement de la coopération avec les Etats-Unis d’Amérique, via l’Institut des relation du Pacifique, organisation internationale non-gouvernementale qui va coexister avec le SDN et qui réunit les grands pays riverains de la zone Pacifique.

Ici aussi, les objectifs économiques qui sont ceux d’un « Shibusawa Eiichi[16] dit « le père du capitalisme japonais » et fondateur de la très influente Association pour la Société des Nations (国際連盟会, kokusai renmei-kai?) s’accordent parfaitement avec le rôle influent que Nitobe Inazō exerce au sein de l'Institut des relations du Pacifique (太平洋問題調査会 , Taiheiyō mondai chōsakai?), dont il a eu un rôle clé pour sa création.

Outre les nombreux voyages et les relations nouées avec les responsables politiques et économiques américains tout au long de sa carrière, l’autre point commun de Nitobe Inazō avec Shibusawa Eiichi est son appartenance à la sphère de ces élites japonaises qui, au cours des années 1920, ont été ouvertes à tous les aspects positifs de la coopération internationale : « fait massif qui va à l’encontre de l’image d’Epinal d’agressivité supposée d’un Japon, qui, depuis Meiji, aurait finalement entraîné le pays dans la IIème Guerre Mondiale. »[Notes 1]

Au début des années 1920, Nitobe Inazō est ainsi l’une des principales figures de la très active « association pour la SDN » dont Shibusawa Eiichi est le président, et « qui réunit hauts fonctionnaires, hommes d’affaires et patrons de presse, avec la mission de diffuser l’idéologie de la coopération internationale à travers les médias et les réseaux d’influence du Japon. »[Notes 1]

Politiquement, Nitobe Inazō diplomate est solidaire de la ligne gouvernementale incarnée par des hommes politiques de tendance internationaliste modérée, tels que Shidehara Kijurō,[17] ambassadeur du Japon aux Etats-Unis de 1919 à 1922, puis à deux reprises Ministre des Affaires étrangères entre 1924 et 1931.

Partisan d’entretenir de bonnes relations avec les Etats-Unis, premier partenaire commercial du Japon, et de défendre les intérêts du Japon par la voie de la négociation internationale, les positions de Shidehara Kijurō[17] sont de plus en plus contestées, à partir du tournant des années 1930, par des généraux influents, et se heurtent à l’opposition des élites japonaises expansionnistes revendiquant des droits qui feraient de la Chine un Etat vassal du Japon.

Échec de l'internationalisme à la veille de la Seconde Guerre Mondiale

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En ce début des années 1930, l’échec politique des partisans de la ligne internationaliste modérée, à laquelle Nitobe Inazō restera attachée jusqu’à la fin de sa carrière, se marque également dans le domaine économique, les ravages de la crise de 1929 remettant en cause le choix de la coopération internationale fondé sur le postulat des gains collectifs induits par les mécanismes de l’étalon-or et du libre échange.

« La carrière de Nitobe Inazō prend fin au moment où le Japon se trouve confronté à la double montée de l’antiparlementarisme et de l’ultranationalisme qui se propagent à partir de 1932, exacerbés par la publication du rapport Lytton (リットン報告書, Ritton Hōkokusho?), condamnation de la politique du Japon en Mandchourie qui conduit le Japon, dès cette année 1933, à annoncer sa décision de quitter la SDN[18], époque à partir de laquelle les partisans de l’internationalisme deviennent politiquement inaudibles. »[Notes 1]

Le paradoxe de Nitobe Inazō diplomate est ainsi d’apparaître a posteriori comme une personnalité à la fois en décalage et en avance sur son temps.

Une du Asahi Shinbun annonçant le retrait de la SDN,1933, Tokyo

Le décalage entre le courant internationaliste modéré, dont Nitobe Inazō est une figure de premier plan, et les orientations politiques nationalistes et ultranationalistes des gouvernements japonais à partir du début des années 1930 se marque déjà, dès la fin des années 1920, par des tensions visibles sur la scène publique, notamment avec les associations militaristes, et culmine avec la période, qui coïncide, l’année même de la mort de Nitobe Inazō, avec le tournant de l’ultranationalisme et la sortie annoncée du Japon de la S.D.N.

Fidèle à ses convictions internationaliste modérées, Nitobe Inazō diplomate apparaît ainsi, au crépuscule de sa carrière, à l’instar de Shidehara Kijurō[17] comme une personnalité exposée au décalage idéologique avec les courants ultranationalistes majoritaires contre lesquels rien ne paraît pouvoir être politiquement organisé.

Jusqu’à la démission de son poste au sein de la SDN en 1926, la durée des fonctions que Nitobe Inazō exerce en tant qu’ambassadeur culturel du Japon au sein de la Commission internationale de Coopération intellectuelle apparaît relativement brève.

Néanmoins, l’œuvre commencée par Nitobe Inazō aura une fructueuse postérité, car les deux domaines de l’éducation et de la culture seront au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, les domaines de compétences de l’UNESCO, dont Nitobe Inazō et les principaux membres des délégations des pays-membres de la Commission internationale de Coopération intellectuelle auront ainsi jeté les bases, dès le début des années 1920.

C’est le deuxième terme du paradoxe de l’itinéraire de Nitobe Inazō diplomate internationaliste : précurseur de l’édification d’un Japon contemporain, pacifiquement intégré à la société internationale, et bénéficiaire, en tant que puissance économique majeure, des options de paix et de dialogue multilatéral dont Nitobe Inazō aura été, en avance sur son temps, le porte-parole et le visionnaire éclairé.

Écrivain

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Principalement connu dans le monde littéraire pour son essai qui a marqué la représentation du Japon dans le monde jusqu’à aujourd’hui : Bushidō, l'âme du Japon[19]. Rédigé directement en anglais et publié en 1900 à destination principale du lecteur américain de l’époque. Par cet essai, Nitobe veut promouvoir largement aux occidentaux la pensée “traditionnelle” japonaise présentée à travers le code éthique des samouraïs, le « bushido ». Cette œuvre a commencé à être traduite en japonais et d’autres langues à partir de 1908[20].

L’influence littéraire de Nitobe s’étend bien sûr au-delà de cet essai. Dans l’élan de son époque, l’auteur a écrit de nombreux ouvrages comme The Japanese Nation: Its Land, Its People, and Its Life[21], traitant du développement du Japon moderne, de la culture traditionnelle et des rapports avec l’Occident.

Le parcours intellectuel de Nitobe, fortement influencé par son éducation internationale, dont ses années d’études aux Etats-Unis et en Allemagne, lui ont donné cette approche biculturelle reconnaissable dans l’ensemble de ses écrits[12]. Nitobe a ainsi compris que la religion et les principes moraux sont les piliers de la réussite des puissances occidentales, en particulier des Etats-unis. Nitobe a donc cherché dans l’histoire du Japon un socle moral et partagé dans l’archipel. Sa maîtrise de l’anglais lui a permis d’accéder à la pensée occidentale et de s’adresser à des publics étrangers sans avoir à passer par la traduction. Tout en essayant de rester fidèle à une culture japonaise orientée selon des critiques posthumes, il s’est efforcé de rendre accessible au monde une compréhension générale de la morale japonaise[22].

Bushido: l'âme du Japon

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Bushido (1900)

Bushido: l'âme du Japon est donc un essai élogieux de la culture morale japonaise qui se veut de justifier l’émergence de la nation japonaise au même niveau que les puissances occidentales déjà présentes. Le développement de l’essai met en relation le principe du Bushido et les vertus morales des Japonais. En ce sens, l’auteur entend ériger une compréhension mutuelle de la moralité au Japon et du reste du monde s’appuyant sur des valeurs existantes et promues dans le christianisme mais bien aussi partagées au Japon, comme le devoir et l’humilité. L’essai structuré autour des fondamentaux du Bushido instruit le lecteur par ce rapprochement des principes moraux chrétiens dont l’espérance, la charité ou encore la piété avec les principes du Bushido présentés ainsi : Gi (義) La Droiture : le fait d’agir correctement quel que soit la situation ; Yu (勇) Le Courage : aussi bien mentalement que physiquement ; Jin (仁) La Bienveillance : La compassion envers les démunis ; Rei (礼) Le Respect : envers soi et les autres ; Makoto (誠) La Sincérité : N’avoir qu’une parole ; Meiyo (名誉) l’Honneur : la réputation est la valeur d’un homme. Chūgi (忠義) La Loyauté : envers ses supérieurs et l’Etat[20]. Selon Nitobe, la maîtrise de soi et la discipline sont des éléments clés de la formation de l'individu[20].

L’adhésion de Nitobe Inazo au quakerisme, est indissociable de la présence de valeurs pensées occidentales incluant justice sociale et paix internationale devenues centrales dans son travail d’écrivain. L’œuvre la plus explicite à son appartenance religieuse est : Nitobe Memorial Lectures: Christian Ethics and the Spirit of the Nation (1937) publiée plusieurs années après sa mort, regroupant ses réflexions sur l’éthique chrétienne et le nationalisme.

La majorité des œuvres de l’écrivain ne sont pas directement orientées sur des pensées religieuses. Toutefois, à travers certaines idées occidentales promues, les principes chrétiens y sont bien présents sans pour autant renier les valeurs japonaises, notamment confucéennes. L’apport du religieux dans ses écrits est sous forme de promotion de la paix entre les nations et de la moralité censée enrichir et développer l’entente entre le Japon et l’Occident. Au-delà de la publication de livres, Nitobe a rédigé et participé à la rédaction d’essais sur l’éducation, l’économie et les relations internationales dont : Japan: Some Phases of Her Problems and Development (1913)[23].

Héritage

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A la fin de sa vie, Nitobe a laissé des écrits à but introspectif sur l’identité du Japon moderne dont son autobiographie, publiée par son épouse un an après son décès : Reminiscences of Childhood in the Early Days of Modern Japan[24]. Au cœur de ce développement s’entremêlent réflexions historiques et ouverture du Japon sur le monde. Toujours rédigé en anglais, l’ouvrage s’adresse à l’Occident.

Nitobe a laissé derrière lui un héritage intellectuel et littéraire riche qui a exercé une influence sur la place du Japon dans le monde et sur la représentation du Japon par les Japonais eux-mêmes[22]. Cette influence lui a attribué de nombreuses biographies et études critiques sur ses principaux ouvrages[25]. De nouvelles éditions qui répertorient l’ensemble de sa pensée ont aussi été publiés : Nitobe Inazō Zenshū (新渡戸稲造全集?), comprenant les versions originales en langues anglaise et japonaise[26].

Notes et références

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  1. Revenir plus haut en : a b et c La plupart des éléments d’analyse des relations internationales contenus dans cette fiche biographique sont repris du cours magistral de M. le Professeur Bernard Thomann, INALCO, Histoire du Japon (année universitaire 2023/2024)

Références

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  1. (ja) Iwate Historical Biography Committee, Iwate-ken seishi rekishi jinbutsu daijiten, , p. 289
  2. (ja) « 人物用語集 », sur 新渡戸記念館 (consulté le )
  3. Torii Kiyoharu, Nitobe Inazô no tegami, pp. 42-43
  4. Nitobe à Miyabe, 5 Octobre 1884, Nitobe lnazô no tegami, pp. 57-59. Pour le ressenti de Nitobe à Meadville, voir "Ryûgaku dan," Gakugei zasshi 20:62;
  5. Ryûgaku dan,"Gakugeikai zasshi 21:79," dans le Kigan no ashi, p. 138
  6. Revenir plus haut en : a b et c Ôta Inazo, "Friends’ Mission in Japan », Revue, 30 Janvier 1886, pp. 413-14.
  7. "Inazo Ôta, " The Friends’ Review, 21 Juillet 1887, p. 806
  8. Revenir plus haut en : a b et c (ja) « 新渡戸文化学園 » Accès libre
  9. Revenir plus haut en : a b c et d John F. Howes, Nitobe Inazo: Japan's Bridge Across the Pacific, Taylor & Francis Group, (ISBN 978-0-367-01735-4 et 978-0-429-72368-1)
  10. (ja) Inazō Nitobe, 婦人に勧めて, Tokyo,‎ , p. 2-3
  11. (ja) « 創立期の人々 | 歴史 | 大学について », sur 東京女子大学
  12. Revenir plus haut en : a b c d et e Seiichi Iwao, Teizō Iyanaga, Susumu Ishii et Shōichirō Yoshida, « 276. Nitobe Inazō (1862-1933) », Dictionnaire historique du Japon, vol. 16, no 1,‎ , p. 15–16 (lire en ligne, consulté le )
  13. Archives de la SDN 1924, Office des Nations Unies à Genève. Photographie issue de cette collection.
  14. Seiichi Iwao, Tarō Sakamoto, Keigo Hōgetsu et Itsuji Yoshikawa, « 164. Fukuzawa Yukichi (1835-1901) », Dictionnaire historique du Japon, vol. 5, no 1,‎ , p. 99–100 (lire en ligne, consulté le )
  15. (en) « Yukichi Fukuzawa: Keio University » Accès libre (consulté le )
  16. Seiichi Iwao, Teizō Iyanaga, Susumu Ishii et Shōichirō Yoshida, « 304. Shibusawa Eiichi (1840-1931) », Dictionnaire historique du Japon, vol. 18, no 1,‎ , p. 16–16 (lire en ligne, consulté le )
  17. Revenir plus haut en : a b et c Seiichi Iwao, Teizō Iyanaga, Susumu Ishii et Shōichirō Yoshida, « 317. Shidehara Kijūrō (1872-1951) », Dictionnaire historique du Japon, vol. 18, no 1,‎ , p. 20–20 (lire en ligne, consulté le )
  18. Seiichi Iwao, Teizō Iyanaga, Susumu Ishii et Shōichirō Yoshida, « 527. Kokusai-remmei dattai », Dictionnaire historique du Japon, vol. 13, no 1,‎ , p. 41–41 (lire en ligne, consulté le )
  19. (en) Nitobe, Inazō, Bushido: The Soul of Japan,
  20. Revenir plus haut en : a b et c « The Project Gutenberg eBook of Bushido, by Inazo Nitobé, A.M., Ph.D.. », sur www.gutenberg.org
  21. « Review of The Japanese Nation, Its Land, Its People, and Its Life », The Advocate of Peace (1894-1920), vol. 79, no 4,‎ , p. 126–127 (ISSN 2155-7799, lire en ligne, consulté le )
  22. Revenir plus haut en : a et b Lauriane Millet, « « Esprit japonais » et prémices du multiculturalisme. Le Japon et l’Organisation de coopération intellectuelle dans l’entre-deux-guerres », Relations internationales, vol. 162, no 2,‎ , p. 31–44 (ISSN 0335-2013, DOI 10.3917/ri.162.0031, lire en ligne, consulté le )
  23. (en) Nitobe Inazo, Japan : Some Phases Of Her Problems And Developments (lire en ligne)
  24. Inazo Ota 1862-1933 Nitobe, Reminiscences of childhood in the early days of modern Japan, Maruzen, (lire en ligne)
  25. (en) Sato Masahiro, « Nitobe Inazo and Bushido », Pioneers,‎ , p. 39-43 (lire en ligne [PDF])
  26. (ja) « イーショップ教文館:新渡戸稲造全集(増補復刻版) », sur イーショップ教文館 (consulté le )